Les syndicats espéraient que les manifestations de mardi seraient encore plus importantes que le 19 janvier

Paris (AFP) - Les manifestants français ont lancé mardi une nouvelle campagne pour faire pression sur le président Emmanuel Macron afin qu'il abandonne un plan de réforme des retraites, avec des centaines de milliers de personnes dans la rue et des grèves perturbant les transports et les écoles.

Des manifestants dirigés par les syndicats sont sortis pour des manifestations de masse pour la deuxième fois en moins de deux semaines, contestant le projet de Macron de relever l'âge de la retraite de 62 à 64 ans, une réforme phare de son deuxième mandat.

Un demi-million de personnes manifestaient mardi après-midi rien qu'à Paris, a indiqué le principal syndicat CGT, supérieur au chiffre de 400 000 qu'il avait donné pour le dernier jour des rassemblements du 19 janvier.

Une source policière a déclaré que les autorités se préparaient à ce que jusqu'à 1,2 million de personnes descendent dans la rue dans tout le pays, ce qui dépasserait les 1,1 million qui sont sortis le 19 janvier.

Mais Macron n'a montré aucun signe de recul, insistant lundi sur le fait que la réforme était "essentielle".

Les transports en commun étaient proches de l'arrêt

L'ouvrier des transports Arnaud Roure, 47 ans, faisait partie des manifestants.

"Mesdames et messieurs du gouvernement, vous épuisez les gens, vous aspirez toutes les ressources qui nous restaient", a-t-il déclaré. "Vous attaquez notre pain."

- 'Mon travail est dur' -

Les premières marches avaient commencé le matin dans d'autres parties du pays, avec la participation de plusieurs personnalités politiques de l'opposition.

"M. Macron est certain de perdre", a déclaré Jean-Luc Mélenchon, figure de proue de l'extrême gauche et ancien candidat à la présidentielle, alors qu'il défilait dans la ville portuaire méridionale de Marseille.

La partie la plus controversée de la refonte est le relèvement de l'âge minimum de la retraite, mais elle appelle également à plus d'années travaillées pour avoir droit à une pension à taux plein.

"Je ne veux pas travailler plus longtemps", a déclaré Sylvie Dieppois, 56 ans, aide de cuisine près de Rouen dans l'ouest de la France. "Mon travail est dur et même à 62 ans, je serai épuisé."

La France a l'âge d'admission à la retraite le plus bas parmi les grandes économies européennes.

Des millions de personnes ont dû trouver des moyens de transport alternatifs mardi, travailler à domicile ou s'absenter pour s'occuper de leurs enfants d'âge scolaire, les travailleurs des transports et de l'éducation faisant partie de ceux qui ont organisé des débrayages.

"Il ne s'agit pas seulement de retraites, il s'agit du type de société que nous voulons", a déclaré à l'AFP Martine Beugnet, professeure d'université de 59 ans.

Le métro parisien et les services ferroviaires de banlieue ont été sévèrement limités, tout comme les déplacements interurbains.

Une source syndicale a indiqué à l'AFP que 36,5% des salariés de la SNCF avaient arrêté le travail, contre 46,3% le 19 janvier.

Carte montrant le tracé prévu des nouvelles manifestations contre la réforme des retraites, à Paris le 31 janvier

Environ un quart de tous les enseignants des écoles maternelles et primaires étaient en grève, selon le ministère de l'Education. Dans les collèges et lycées, plus de la moitié des enseignants ont arrêté le travail, a indiqué un syndicat d'enseignants.

L'industrie pétrolière française était en grande partie paralysée, le syndicat CGT du géant de l'énergie TotalEnergies faisant état de 75 à 100 % de travailleurs en grève.

Près de deux fonctionnaires sur 10 étaient en grève à midi, ont indiqué les autorités, contre 28% le 19 janvier.

- "Faire participer les jeunes" -

Des lycéens et des universitaires ont également rejoint le mouvement, quelques dizaines d'étudiants de la prestigieuse université Sciences-Po occupant du jour au lendemain son bâtiment principal.

"Il est important d'impliquer les jeunes dans le débat sur les retraites", a déclaré l'étudiant Jean-Baptiste Bonnet.

Même une prison, dans la ville de Nîmes, dans le sud-ouest, a été bloquée par le personnel qui manifestait, a indiqué une source syndicale.

Des politiciens de l'opposition, dont Jean-Luc Melenchon, se sont joints à l'action

Soixante et un pour cent des Français soutiennent le mouvement de protestation, a montré lundi un sondage du groupe de sondage OpinionWay – une augmentation de trois points de pourcentage par rapport au 12 janvier.

"Plus les Français se renseignent sur la réforme, moins ils la soutiennent", a déclaré Frédéric Dabi, éminent sondeur à l'institut Ifop.

"Ce n'est pas bon du tout pour le gouvernement."

Le gouvernement a déclaré que les changements sont nécessaires pour garantir le financement futur du système de retraite, qui devrait basculer en déficit au cours des prochaines années.

Mais les opposants soulignent que le système n'est pas en difficulté, insistant sur le fait que les dépenses de retraite ne sont pas hors de contrôle.

Le gouvernement a signalé qu'il pourrait y avoir une marge de manœuvre sur certaines des mesures suggérées, mais pas sur la limite d'âge.

Les alliés centristes de Macron, à défaut d'une majorité absolue au parlement, auront besoin des votes des conservateurs pour faire adopter la nouvelle législation.

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