Le Français Emmanuel Macron, vu à gauche, espère gagner le soutien de l'Espagnol Pedro Sanchez pour sa position intransigeante sur le prétendu protectionnisme américain

Barcelone (AFP) - Le président français Emmanuel Macron et l'Espagnol Pedro Sanchez ont signé jeudi à Barcelone un traité d'amitié franco-espagnol, alors que Paris sollicite le soutien de Madrid pour sa position intransigeante dans un différend commercial avec Washington.

La réunion de haut niveau a eu lieu alors qu'une grève nationale contre une campagne controversée de réforme des retraites a été lancée en France, qui a été frappée par une journée de protestation contre les projets de relèvement de l'âge de la retraite de 62 à 64 ans.

Le couple s'est rencontré au Musée national d'art de Catalogne pour un tête-à-tête, puis a signé un traité d'amitié et de coopération renforçant les liens bilatéraux sur des questions telles que la migration, la défense et l'énergie.

Avec le traité, Paris cherche à cimenter des liens plus forts avec des voisins autres que l'Allemagne, notamment ceux du sud de l'Europe, à un moment où l'alliance Paris-Berlin qui sous-tend l'unité de l'UE montre des signes de tension.

Mais l'objectif principal de Macron est de rechercher "une position commune avec Madrid" sur la réponse de l'Europe à la loi historique de Washington sur la réduction de l'inflation (IRA), un plan d'investissement massif pour accélérer la transition américaine vers l'énergie verte.

Le couple, vu ici le mois dernier lors d'un sommet à Alicante, a récemment accepté de travailler ensemble sur un important pipeline d'hydrogène reliant Barcelone et Marseille

L'Europe craint que le plan, qui injectera des milliards de dollars dans des technologies respectueuses du climat, ne fausse le commerce transatlantique pour donner aux entreprises américaines un avantage injuste.

Macron, qui a carrément dénoncé les subventions comme "super agressives" lors d'une visite à Washington en novembre, souhaite que Bruxelles emboîte le pas rapidement pour éviter une fuite d'entreprises européennes délocalisant pour profiter des subventions américaines.

Mais jusqu'à présent, les pays de l'UE sont divisés sur la manière de réagir à la loi, l'approche dure de Macron gagnant peu de terrain en Espagne.

- Divisions en Europe -

S'adressant à CNBC plus tôt cette semaine, Sanchez a admis que l'Europe avait "quelques devoirs à faire", notamment repenser sa propre politique de subventions "pour envoyer un message à l'industrie du monde entier que l'Europe - et bien sûr, l'Espagne - est un bon endroit" pour investir.

Le dirigeant français espère également enrôler Olaf Scholz à son poste, même si la chancelière allemande est jusqu'ici apparue plus encline au dialogue qu'à la contestation avec Washington.

Scholz est attendu dimanche à Paris pour marquer les 60 ans de la signature d'un traité d'amitié franco-allemand d'après-guerre.

Le sommet Macron-Sanchez intervient trois mois seulement après que Paris, Madrid et Lisbonne ont convenu de construire un énorme pipeline sous-marin d'hydrogène reliant Barcelone et Marseille qui sera la clé de l'indépendance énergétique de l'UE.

La police de Barcelone a déclaré que 6 500 manifestants séparatistes catalans avaient rejoint la manifestation contre le sommet franco-espagnol, mais les organisateurs ont estimé le chiffre à 30 000.

Barcelone a été choisie pour accueillir le sommet car "elle sera au cœur de ce projet stratégique", a déclaré la porte-parole du gouvernement espagnol Isabel Rodriguez du pipeline H2Med, également connu sous le nom de BarMar.

Madrid veut également montrer que la situation dans la région du nord-est de la Catalogne s'est normalisée depuis 2017, lorsque les séparatistes y ont organisé une tentative d'indépendance ratée, déclenchant la plus grande crise politique espagnole depuis des décennies.

Mais les groupes indépendantistes opposés au sommet étaient sortis en masse tôt jeudi, avec des milliers de personnes se rassemblant près du lieu en criant : « Indépendance ! et agitant des drapeaux séparatistes, a déclaré un correspondant de l'AFP.

"Le gouvernement espagnol a voulu montrer qu'il nous a battus et que nous avons renoncé à l'indépendance", a déclaré à l'AFP David Garcia, économiste de 52 ans.

"Mais c'est pour leur montrer que nous n'avons rien lâché", a-t-il dit en serrant un drapeau de l'indépendance.

La police de la Guardia Urbana de Barcelone a donné un chiffre de 6 500 manifestants mais les organisateurs ont donné un chiffre beaucoup plus élevé de 30 000.