Le pape François doit rencontrer des victimes d'agressions sexuelles commises par des religieux lors d'un séjour de trois jours en Belgique, un pays entaché par des décennies de scandales et de dissimulations

Bruxelles (Belgique) (AFP) - Le pape François a déclaré vendredi que l'Eglise catholique devait "demander pardon" pour le "fléau" des abus sexuels sur mineurs, lors d'une visite en Belgique où plane le sombre passé de l'Eglise.

Dans un discours devant les dirigeants politiques et de la société civile qui a ouvert sa visite de trois jours dans le pays, François a dénoncé les « cas tragiques d'abus sur mineurs » comme une tache sur l'héritage de l'Église.

« C'est notre honte et notre humiliation », a déclaré François lors de la cérémonie organisée au palais royal de Laeken.

« L’Église doit avoir honte et demander pardon », a-t-il déclaré.

Le souverain pontife de 87 ans doit rencontrer dans l'après-midi à Bruxelles un groupe de victimes d'agressions sexuelles commises par des clercs, dans le cadre d'un séjour de trois jours dans cette nation européenne entachée par des décennies de scandales et de dissimulations.

La rencontre avec une quinzaine de victimes, qui a eu lieu à 18h30 (16h30 GMT) à la mission diplomatique du Vatican, s'est déroulée dans la "plus grande discrétion", selon l'Eglise belge.

Cette initiative a été prise après qu'un documentaire percutant, diffusé l'année dernière, a remis le scandale des abus sexuels en Belgique sur le devant de la scène, incitant de nombreuses nouvelles victimes à se manifester.

Dans une lettre ouverte publiée par le journal Le Soir ce mois-ci, certains demandent au pape de s'attaquer à la pédophilie et de mettre en place un processus de réparations financières.

« Les mots ne suffisent pas. Il faut aussi prendre des mesures concrètes », a déclaré le Premier ministre belge Alexander De Croo en préambule du discours du pape.

Le pape a déclaré que le scandale des abus était « un fléau auquel l’Église s’attaque avec fermeté et détermination, en écoutant et en accompagnant les personnes blessées, et en mettant en œuvre un programme de prévention dans le monde entier ».

- Adoption forcée -

François a fait de la lutte contre les agressions sexuelles dans l’Église une mission principale de son pontificat et a insisté sur une politique de « tolérance zéro » à la suite de scandales d’abus de grande ampleur dans le monde entier.

Lors de son discours, François s'est également dit « attristé » d'apprendre le scandale des adoptions forcées en Belgique, qui a vu des institutions dirigées par des religieuses abandonner les bébés de milliers de filles mineures et de femmes célibataires.

« Nous voyons comment les fruits amers des méfaits et de la criminalité se sont mêlés à ce qui était malheureusement l’opinion dominante dans toutes les parties de la société à cette époque », a-t-il déclaré.

Le site d'information belge HLN estime que jusqu'à 30 000 enfants ont été enlevés à leur mère en Belgique entre 1945 et les années 1980.

Les évêques belges ont présenté leurs excuses en 2023 et demandé une enquête indépendante après la publication de nouveaux témoignages de femmes et de personnes affirmant avoir été « vendues » par l’Église catholique à leur famille adoptive.

Les abus sexuels sur mineurs et les adoptions forcées ont « gravement endommagé la confiance » entre l’Église et la société, a déclaré De Croo.

Signe du travail qui reste à accomplir, le programme de la messe en plein air concluant le voyage de François dimanche a dû être modifié à la dernière minute après qu'il est apparu que l'hymne de clôture avait été composé par un prêtre accusé d'abus sexuels.

Cette erreur a incité le président de la conférence des évêques belges, l'archevêque Luc Terlinden, à admettre que l'Église devait mieux surveiller les cas et les auteurs.

« Cela représente un grand défi pour nous, mais nous devons y réfléchir sérieusement avec l'aide d'avocats et de psychologues », a-t-il déclaré à une radio locale. Le compositeur, décédé ce mois-ci, aurait conclu un accord à l'amiable en 2002 pour abus sexuel.

- Sur le déclin -

Le pape argentin est arrivé jeudi soir en Belgique après avoir passé la journée au Luxembourg voisin, où il a lancé un appel à la diplomatie internationale dans un contexte de conflits éclatants à travers le monde.

Il a été accueilli par le roi Philippe et la reine Mathilde, qui l'ont reçu vendredi matin, et il se rendra ensuite à la rencontre des universitaires de l'université catholique de Louvain, en Flandre néerlandophone - dont le 600e anniversaire l'an prochain est la raison officielle de la visite de François.

Samedi, lors de son 46e voyage à l'étranger, François rencontrera le clergé dans la vaste basilique du Sacré-Cœur avant d'échanger avec des étudiants de Louvain-la-Neuve, en Wallonie francophone, notamment sur les questions climatiques.

La dernière visite papale à Bruxelles remonte à 1995, lorsque Jean-Paul II assista à la béatification de saint Damien, qui consacra sa vie aux lépreux.

Près de 65 pour cent de la population belge est chrétienne, dont 58 pour cent sont catholiques, selon les chiffres de l'université de Louvain.

Mais leur nombre est en baisse, reflétant un déclin à travers l’Europe.

Lors de son audience générale hebdomadaire, François a déclaré qu'il espérait que sa visite puisse être « l'occasion d'un nouvel élan de foi ».