Les ordures se sont accumulées à Paris la semaine dernière en raison d'une grève des éboueurs

Paris (AFP) - Des ordures non ramassées ont encombré mercredi les rues de la capitale française alors que les syndicats ont fait une tentative réduite de dernière minute pour empêcher l'adoption d'une réforme des retraites profondément impopulaire.

Les sondages d'opinion montrent qu'environ deux tiers des Français sont contre la législation visant à relever l'âge de la retraite de 62 à 64 ans, à étendre les cotisations pour une retraite à taux plein et à supprimer certains privilèges spéciaux pour les employés du secteur public.

Mais malgré deux mois de protestations et de grèves intersectorielles, le projet de loi défendu par le président Emmanuel Macron semble sur le point d'être adopté au parlement.

Les manifestations ont débuté mercredi dans toute la France, de Calais, dans le nord du pays, à Marseille, dans le sud du pays, lors d'une nouvelle journée de grèves et de manifestations.

Des manifestants sont descendus dans la rue contre la réforme des retraites dans la ville méridionale de Marseille

Mais la police attendait entre 650 000 et 850 000 manifestants dans tout le pays, a indiqué une source sous couvert d'anonymat, bien moins que les plus grands rassemblements de la semaine dernière.

Le taux de participation à la grève dans les secteurs de l'énergie et des transports à midi était également inférieur à celui des jours précédents d'action nationale, selon des chiffres préliminaires.

Le bras de fer était pourtant visible dans les tas d'ordures qui parsèment Paris, où les éboueurs municipaux et les nettoyeurs ont arrêté le travail depuis le début de la semaine dernière.

Environ 7 000 tonnes de déchets se sont accumulées sur les trottoirs d'environ la moitié de la ville, alarmant les visiteurs étrangers et inquiétant les restaurateurs.

- 'Ça sent' -

Dans un café presque vide du centre de Paris à l'heure du déjeuner mercredi, le gérant Gregory Brault, 38 ans, a déclaré avoir constaté une nette baisse de la clientèle.

« Les gens ne veulent pas manger en terrasse face aux poubelles. Ça pue », a-t-il dit.

Des tonnes de déchets sur les trottoirs parisiens éloignent les clients des restaurants

Il a dit qu'il venait maintenant une heure plus tôt chaque jour pour nettoyer les déchets de sa porte, mais d'énormes monticules de sacs poubelles noirs à travers le quartier éloignaient toujours les employés de bureau et les touristes.

Ces derniers jours, les habitants de la région avaient commencé à repérer des rats.

"Si demain ils arrivent à l'intérieur et que je passe une inspection sanitaire, ils me fermeront", a-t-il déclaré.

Même dans l'autre moitié de Paris – où les entreprises privées évacuent encore les déchets – la collecte a été compliquée car deux incinérateurs clés en dehors de la capitale sont en grève.

Les nettoyeurs de rue ont voté mardi pour prolonger leur débrayage jusqu'à lundi prochain, obligeant le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin à demander à la municipalité de la capitale de leur ordonner de reprendre le travail.

La maire de Paris, Anne Hidalgo, a rétorqué qu'elle n'avait "aucun pouvoir" ou intention de le faire.

Les travailleurs des centrales électriques étaient en grève

Dans le secteur de l'énergie, certains travailleurs des centrales électriques étaient en grève.

Le domicile officiel de Macron dans le sud de la France, le Fort de Bregancon, faisait partie de plusieurs zones ciblées par des coupures de courant, a déclaré le syndicat CFE-CGC.

Mais dans l'ensemble, les grèves semblaient s'essouffler.

Seuls 22% des travailleurs du géant de l'énergie contrôlé par l'État EDF avaient débrayé mercredi à midi – moins que lors des manifestations de mardi la semaine dernière.

Seulement 15% des employés des chemins de fer avaient refusé de travailler, a déclaré une source syndicale, moins de la moitié du chiffre de la semaine dernière.

Le dernier jour des manifestations samedi a vu beaucoup moins de personnes défiler que lors des tours précédents.

- 'Majorité naturelle' -

Une commission parlementaire a entamé mercredi l'examen du plan de retraite, avant un vote conjoint de la basse Assemblée nationale et du Sénat qui pourrait intervenir dès jeudi.

Graphique montrant l'âge moyen de la retraite pour certains pays de l'UE

La principale question est de savoir si le gouvernement minoritaire de Macron peut rassembler le nombre de voix requis à l'assemblée, où il aura besoin du soutien du parti d'opposition Les Républicains (LR) pour faire adopter la législation.

La proposition phare de Macron rapprocherait la France de ses voisins de l'UE, dont la plupart ont repoussé l'âge de la retraite à 65 ans ou plus.

Après avoir d'abord affirmé qu'il visait à rendre le système plus équitable, le gouvernement affirme maintenant qu'il s'agit d'éviter les déficits au cours des prochaines décennies.

Le porte-parole du gouvernement, Olivier Veran, a exhorté mercredi les députés à soutenir le projet de loi.

"Plus que jamais, le gouvernement recherche une majorité naturelle pour soutenir cette réforme urgente et cruciale pour notre pays", a-t-il déclaré.

L'évolution des retraites se veut une réforme phare du second mandat du président Emmanuel Macron

La Première ministre Elisabeth Borne a appelé mardi les législateurs LR à peser de tout leur poids derrière le projet de loi.

Mais si elle ne parvient pas à trouver une majorité viable à la chambre basse, elle pourrait utiliser un pouvoir constitutionnel contenu dans l'article 49.3 de la constitution, lui permettant de faire adopter la législation sans vote.

Les analystes préviennent que cela la priverait, ainsi que Macron, de légitimité démocratique et exposerait également le gouvernement à un vote de confiance, qu'il pourrait perdre.

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