Les consommateurs sauront mieux ce qu’il y a dans leurs joints

La Haye (AFP) - Le 15 décembre, le cannabis sera pour la première fois cultivé, vendu et consommé légalement aux Pays-Bas dans le cadre d'un essai de quatre ans à travers le pays.

Voici un petit historique de l'expérience très attendue :

- Attends, ce n'est pas déjà légal ? -

C'est l'une des idées fausses les plus répandues à propos des Pays-Bas, dont la capitale, Amsterdam, est considérée depuis des décennies comme la principale attraction mondiale des fumeurs de cannabis.

En fait, le cannabis n’est pas légal mais « gedoogd » (« toléré »). La vente et la consommation de cannabis sont illégales « mais les autorités choisissent de ne pas poursuivre les contrevenants », selon le site Internet du gouvernement.

Il est cependant totalement illégal (et non toléré) de cultiver du cannabis aux Pays-Bas ou de le fournir aux fameux « coffee shops » où il peut être fumé.

- Pourquoi changer de système ? -

La politique de « tolérance » a été adoptée dans les années 1970 pour différencier les drogues dures des drogues douces, mais a conduit à une étrange zone grise juridique que l’expérience espère éclaircir.

La loi a poussé l'approvisionnement en cannabis des 570 cafés du pays dans la clandestinité, les autorités locales se plaignant de petites délinquances et de comportements antisociaux.

- Alors que se passe-t-il? -

La législation est temporairement suspendue pour permettre aux producteurs et aux fournisseurs d'opérer légalement dans 11 municipalités, approvisionnées par 10 producteurs.

Tous les cafés des communes doivent y participer, afin que les mêmes règles s'appliquent à tous et que les consommateurs sachent qu'ils obtiennent partout la même qualité de produit.

Les autres règles restent les mêmes : maximum de cinq grammes par personne et par jour, interdiction de vendre aux fumeurs mineurs, pas de drogues dures et pas d'alcool sur place.

Seules les personnes vivant aux Pays-Bas peuvent y participer. La municipalité d'Amsterdam Est a également demandé à participer.

Les cafés pourront stocker sur place plus que le maximum actuel de 500 grammes – « en règle générale… jusqu'à un stock d'une semaine », selon les responsables.

- Quels sont les bénéfices? -

L'herbe sera soigneusement suivie et testée, afin que les consommateurs sachent exactement quelle est la force du cannabis. Ceci est mesuré par les niveaux de THC et de CBD, la substance qui produit les effets.

Les métaux lourds potentiellement dangereux et l’aflatoxine – naturellement présente dans le cannabis – seront également surveillés.

Le produit lui-même devrait être de très haute qualité. Le propriétaire d'un café, Rick Brand, a déclaré à l'AFP en octobre qu'il était impossible de savoir exactement ce qu'il vendait selon les anciennes règles.

« Ce que nous recevons jusqu'à présent contient parfois des pesticides, mais aussi des agents étrangers pour augmenter le poids. En fait, nous ne le savons pas vraiment », a-t-il déclaré.

Les autorités espèrent une baisse de la petite délinquance et des comportements antisociaux. Les propriétaires de cafés ont hâte de pouvoir fonctionner avec une clarté juridique.

- Que se passe-t-il ensuite ? -

Des chercheurs indépendants suivront l’expérience tout au long de ses quatre années.

L’objectif est double : voir s’il est possible de réguler la chaîne d’approvisionnement en cannabis jusqu’aux coffee shops, et voir si cela réduit la petite délinquance et les comportements antisociaux.

Le gouvernement « décidera de l’avenir de la politique néerlandaise en matière de coffeeshops sur la base de ces résultats et d’autres facteurs », selon son site Internet, en vue d’une éventuelle décriminalisation.

Une inconnue qui pèse sur cette politique – et sur toutes les politiques – est le facteur Geert Wilders, après que le leader d’extrême droite a remporté les élections le mois dernier.

Son Parti de la liberté, le PVV, veut abandonner définitivement la politique de « tolérance », fermer les cafés et faire pression pour des « Pays-Bas sans drogue ».

Ils ont été classés en bas du classement des partis pour lesquels voter lors des dernières élections par « cannabis-kieswijzer.nl », un site Internet qui évalue les partis politiques en fonction de leurs politiques favorables au cannabis.