Le Hongrois Viktor Orban est le seul dirigeant européen à maintenir des liens avec la Russie malgré l'invasion de l'Ukraine.

Budapest (AFP) - La Hongrie a annoncé lundi sa "joyeuse" prise de la présidence tournante de l'Union européenne (UE), malgré les inquiétudes suscitées par ce que ses détracteurs considèrent comme un gouvernement autoritaire et proche de la Russie.

Le Premier ministre nationaliste Viktor Orban, qui dirige ce pays d’Europe centrale depuis 2010 en promettant de le transformer en une « démocratie illibérale », entre fréquemment en conflit avec Bruxelles sur les questions d’État de droit et de droits de l’homme.

Il est également le seul dirigeant européen à maintenir des liens avec la Russie malgré l’invasion de l’Ukraine. Il a refusé d’envoyer des armes à Kiev et a critiqué à plusieurs reprises les sanctions contre Moscou à cause de la guerre.

La Hongrie succède à la Belgique à la présidence tournante de six mois avec pour devise : « Make Europe Great Again ».

Cela fait écho au cri de ralliement du « bon ami » d’Orban, l’ancien président américain Donald Trump – qui a déjà fait sensation à Bruxelles.

« Tout le monde est heureux que ce soit notre tour de rendre à l'Europe sa grandeur ! », a posté Orban sur X au-dessus d'une photo de lui serrant la main du Premier ministre belge Alexander De Croo.

Les deux hommes souriaient lors de ce qu’Orban a décrit comme une « cérémonie de passation de pouvoirs très joyeuse ».

De Croo a déclaré sur X qu’il était convaincu que la Hongrie « agirait dans l’intérêt de tous les citoyens de l’UE ».

- 'Occupez Bruxelles' -

L'année dernière, le Parlement européen a adopté une résolution non contraignante soulignant le « recul » de la Hongrie en matière de valeurs démocratiques et s'interrogeant sur la manière dont elle pourrait assumer « de manière crédible » la présidence semestrielle du bloc.

Budapest insiste sur le fait qu’elle est prête à assumer « les devoirs et responsabilités » de diriger le bloc de 27 pays.

Elle s'est engagée à être un « intermédiaire honnête, travaillant loyalement avec tous les États membres et toutes les institutions », selon les termes du ministre des Affaires européennes du pays, Janos Boka.

« Dans le même temps, nous pensons que la Hongrie a un mandat fort pour mener une politique européenne forte. Notre travail reflétera cette vision de l’Europe », a-t-il ajouté.

Il a déclaré qu'il était « nécessaire de diriger le navire car l'Europe ne va pas dans la bonne direction ».

Après la dernière présidence hongroise de l’UE en 2011, Orban s’est vanté d’avoir distribué des « films », des « claques » et des « gifles amicales » aux « bourreaux excités » du Parlement européen.

Cette fois, le leader nationaliste de 61 ans se montre encore plus combatif, ayant juré d'« occuper Bruxelles » lors de la campagne pour les élections européennes début juin, en misant sur une percée de la droite.

Mais même si les partis d'extrême droite ont progressé, le Fidesz d'Orban se trouve actuellement isolé, incapable de trouver un groupe au Parlement européen qui lui convienne.

Dimanche, Orban a annoncé qu'il souhaitait former son propre groupe, avec le Parti de la liberté (FPÖ) d'extrême droite autrichien et le parti centriste ANO de l'ancien premier ministre tchèque Andrej Babis.

Ils ont encore besoin que des partis d’au moins quatre autres pays les rejoignent.

La semaine dernière, Orban n’a pas réussi à faire dérailler un accord visant à ramener Ursula von der Leyen à la tête de la puissante Commission européenne, deux autres membres d’une alliance centriste occupant les autres postes les plus élevés.

Dans le même temps, von der Leyen a reporté une visite de courtoisie à Budapest, initialement prévue pour l'ouverture de la présidence. Aucune nouvelle date n'a été fixée.

- Opportunités limitées -

Parmi les sept priorités de la Hongrie pour sa présidence de l'UE figurent la lutte contre la « migration illégale » et le rapprochement des pays des Balkans occidentaux vers l'adhésion à l'UE.

Orban peut utiliser la présidence pour fixer l'ordre du jour, mais il ne peut pas obtenir de résultats sans le soutien de la commission, a déclaré à l'AFP Daniel Hegedus, chercheur principal au German Marshall Fund.

Il a également noté que le Premier ministre hongrois a peu de possibilités d'agir comme un trouble-fête, étant donné que la présidence belge sortante et les institutions de l'UE se sont précipitées pour conclure certaines décisions importantes.

La semaine dernière, l’Union européenne a adopté un nouveau train de sanctions contre la Russie et a officiellement lancé des négociations d’adhésion « historiques » avec l’Ukraine.

Parmi les batailles de la Hongrie avec Bruxelles, elle cherche à débloquer des milliards d'euros de fonds européens qui ont été gelés en raison de ses positions sur des questions telles que les droits LGBTQ, le traitement des demandeurs d'asile et les marchés publics.