L'adoption de la réforme de l'asile intervient avant les élections européennes qui devraient voir une montée en puissance des partis d'extrême droite appelant à la répression de la migration irrégulière

Bruxelles (Belgique) (AFP) - L'UE a donné mardi son feu vert définitif à une refonte historique de ses politiques de migration et d'asile qui verra le renforcement des frontières et le partage des responsabilités entre les États membres.

Une majorité des pays de l'Union européenne ont soutenu les dix textes législatifs de la réforme, garantissant ainsi son adoption malgré l'opposition de la Hongrie et de la Pologne.

La refonte entre en vigueur à partir de 2026.

"Ces nouvelles règles rendront le système d'asile européen plus efficace et augmenteront la solidarité entre les États membres", a déclaré la ministre belge de l'Asile et de la Migration, Nicole de Moor, dont le pays assure actuellement la présidence de l'UE.

La ministre allemande de l'Intérieur, Nancy Faeser, a déclaré que la réforme continue d'aider les personnes fuyant les persécutions, tout en précisant que « ceux qui n'ont pas besoin de cette protection ne peuvent pas venir en Allemagne ou doivent quitter l'Allemagne beaucoup plus rapidement ».

L'adoption intervient un mois avant les élections européennes qui devraient voir une montée en puissance des partis d'extrême droite faisant campagne sur la nécessité de réprimer l'immigration irrégulière.

La refonte des règles d’asile de l’Union européenne a nécessité près d’une décennie de querelles.

La Pologne et la Hongrie restent farouchement opposées aux changements, principalement en raison d’un nouveau « mécanisme de solidarité » à l’échelle du bloc en vertu duquel elles doivent soit accueillir des milliers de demandeurs d’asile, soit payer les pays qui le font.

Mais un nombre écrasant de pays de l’UE ont soutenu les dix lois, ce qui a abouti à leur adoption.

Cette réforme, stimulée par un afflux massif de migrants irréguliers en 2015, dont beaucoup venaient de Syrie et d’Afghanistan déchirés par la guerre, a suscité des critiques de la part des organisations caritatives de défense des droits des migrants, car elle renforce les contreforts de la « forteresse Europe ».

Il crée de nouveaux centres frontaliers qui détiendront les migrants irréguliers pendant que leurs demandes d'asile sont examinées. Les expulsions des personnes jugées inadmissibles seront accélérées.

Les partisans du pacte ont fait de gros efforts pour le forcer à franchir la ligne d'arrivée avant les élections européennes de juin qui auraient pu le voir enterré si un parlement plus à droite était choisi.

La Commission européenne devrait prochainement en définir la mise en œuvre pour qu'il soit opérationnel d'ici moins de deux ans.

- Pousser pour aller plus loin ? -

Parallèlement à ces réformes radicales, l’UE intensifie ses accords avec les pays de transit et d’origine visant à réduire le nombre d’arrivées.

Ces derniers mois, des accords ont été signés avec la Tunisie, la Mauritanie et l’Égypte.

L'Italie a également conclu un accord avec l'Albanie pour envoyer vers le pays les migrants secourus dans les eaux italiennes pendant que leurs demandes d'asile sont traitées.

Par ailleurs, un groupe de pays mené par le Danemark et la République tchèque s'apprête à envoyer une lettre appelant au transfert des migrants récupérés en mer vers des pays extérieurs à l'UE.

Ces nouvelles propositions en matière de pacte sur la migration et l'asile relèveront du prochain exécutif européen qui prendra ses fonctions après les élections européennes.

Mais Camille Le Coz, experte du Migration Policy Institute Europe, a déclaré qu’il y avait « de nombreuses questions » sur la manière dont de telles initiatives pourraient fonctionner.

En vertu du droit européen, les immigrants ne peuvent être envoyés vers un pays extérieur au bloc où ils auraient pu demander l’asile, qu’à condition qu’ils aient un lien suffisant avec ce pays.

Cela exclut – pour l'instant – tout programme tel que l'accord entre le Royaume-Uni et le Rwanda visant à envoyer des arrivées dans ce pays africain.

Le Coz a déclaré qu'il fallait encore « clarifier » comment fonctionneraient les propositions d'accords d'externalisation de l'UE ainsi que « avec qui les autorités européennes travaillent et quels pays tiers sont susceptibles d'accepter ».